Nicolas Philibert
Cinéaste précieux, Nicolas Philibert entreprend depuis plus de trente ans un travail autour du rapport que les humains entretiennent avec leurs semblables. Après une première expérience de co-réalisation avec Gérard Mordillat pour La Voix de son maître (1978) autour d’une série d’entretiens avec les nouveaux patrons de grandes entreprises françaises, il décide de poursuivre en solo vers des sujets avec lesquels il se sent plus en empathie.
Il trouve des dispositifs pour faire parler les humains à travers leurs observations d’objets (La Ville Louvre, 1990) ou d’animaux (Nénette, 2010). Nicolas Philibert, par un léger décalage empreint d’humour et de tendresse, met en scène ce que projettent les observants sur les œuvres du Louvre ou sur l’orang-outan Nénette, doyenne des animaux du Jardin des Plantes, dont la caméra ne se détache pas. Par la parole, il capte l’imaginaire de ses congénères dans un effet miroir qui nous questionne.
En 1996, il s’introduit avec reculons dans le monde psychiatrique avec La Moindre des choses qui suit la vie quotidienne des pensionnaires et soignants à la clinique de La Borde. Il décide de s’abandonner au présent, de se laisser surprendre par les patients, de dépasser ses préjugés. Il revient à la psychiatrie vingt-cinq ans plus tard avec Sur l’Adamant (2023) qui remporte l’Ours d’or à Berlin. Le titre fait référence à un lieu d’hospitalité qui résiste à tout ce qui écrase la psychiatrie hospitalière et, là encore, discret et patient, il filme les échanges ou comment les soignants essaient d’accueillir la parole singulière de toutes ces personnes qui souffrent de troubles, qui ont peur, qui sont enfermées en elles-mêmes et qui le disent. S’en suivent deux autres films qui forment un tryptique, Averroès & Rosa Parks (2024) et La Machine à écrire et autres sources de tracas (2024).
Après un passage à l’hôpital pour des raisons personnelles, Nicolas Philibert en ressort avec la conviction qu’il doit rendre hommage au personnel soignant : ce sera De chaque instant (2018). En 2001, il tourne Être et avoir, sur la vie quotidienne d'une école à classe unique dans un petit village d'Auvergne. Récompensé de par le monde, ce film connaîtra un immense succès en France (1,8 million d'entrées). Dans la lignée du Pays des sourds (1992), il prolonge une réflexion sur la transmission et ses limites dans laquelle Nicolas Philibert jamais n’intervient, restant en observation, précis et modeste, œuvrant à mettre en lumière ce qui meut les êtres entre eux ; l’humanité, tout simplement.
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