Alain Guiraudie
En sa présence
En partenariat avec Le Quai CDN
C’est un cinéaste atypique et précieux, à la carrière déjà bien fournie (sept longs métrages, des moyens et des courts métrages) dont l’ancrage réaliste des films est un leurre propice à des évasions fantastiques. L’imaginaire d’Alain Guiraudie est tourné vers la question du désir comme moteur des actions de ses personnages. Ce désir, souvent homosexuel mais pas que, reconfigure les rapports entre les êtres, ouvrant des brèches existentielles et des lendemains chantants.
En 2013, L’Inconnu du lac lui permet d’accéder à une notoriété plus grande. Entre la chronique et le roman noir, Guiraudie raconte l’histoire de Frank, beau jeune homme qui tombe amoureux de Michel dans un lieu de drague pour hommes. Un soir, il découvre Michel assassinant un autre homme et décide malgré tout de poursuivre sa relation avec lui. Ce récit de passion dangereuse sous le soleil écrasant du lac de Sainte-Croix, au pied des gorges du Verdon (loin de l’Occitanie natale du cinéaste), vaut aussi comme précis des rapports de la drague homosexuelle, merveilleusement mis à distance par deux personnages attachants et parfois comiques : Henri, un homme venant de se faire larguer par sa femme, et le policier, qui semble enquêter aussi bien sur le meurtre que sur le monde qui s’ouvre à lui.
Car le cinéma de Guiraudie a beau prendre souvent la forme de feuilletons picaresques, il se pose aussi des questions. Dès ses premiers courts métrages, les hommes sont en mouvement, inquiets et pensifs. Des années plus tard, Rester vertical (2015) prolonge ces figures de personnage indécis, à la pensée désordonnée.
Également romancier, Alain Guiraudie publie en 2021 l’imposant Rabalaïre dont il semble maintenant piocher des partis comme inspiration pour son travail de cinéaste. En occitan, le terme désigne une personne seule qui n’est jamais chez elle, « un mec qui va à droite, à gauche ». Miséricorde, son dernier film présenté à Cannes et pendant l’Estival, se trouve à la croisée de ses influences, entre la fantaisie hédoniste et l’angoisse existentielle. On y trouve au casting le jeune Félix Kysyl (présent à Premiers Plans l’année dernière en tant que lecteur de scénario), Catherine Frot ou encore Jean-Baptiste Durand, le réalisateur de Chien de la casse.
En partenariat avec le théâtre Le Quai qui propose Et j’en suis là de mes rêveries de Maurin Ollès d’après Rabalaïre, le Festival Premiers Plans est très heureux de rendre hommage à Alain Guiraudie pour découvrir ou redécouvrir un auteur qui trace un sillon unique dans le champ du cinéma français.